Si seulement deux gènes déterminent la taille chez le cheval, dix-neuf gènes déterminent son comportement. Ou du moins, dans un cas comme dans l'autre, une prédisposition qui sera ou non exploitée dans le bon sens par les effets du milieu et par l'intervention de l'homme, de l'éleveur au jockey en passant par le débourreur et l'entraîneur. Récente avancée de la génomique, le gène de la motivation (= PRCP, ou motivator gene) a été isolé par des chercheurs irlandais de l'University College Dublin, et une société de génomique commercialise désormais un test permettant de déterminer s'il est ou non présent dans le génotype d'un cheval.
Basé sur une étude reposant sur l'analyse de 4.500 sujets, le bien-fondé de cette découverte repose sur le fait qu'un poulain montrant de la volonté à l'entraînement
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Si seulement deux gènes déterminent la taille chez le cheval, dix-neuf gènes déterminent son comportement. Ou du moins, dans un cas comme dans l'autre, une prédisposition qui sera ou non exploitée dans le bon sens par les effets du milieu et par l'intervention de l'homme, de l'éleveur au jockey en passant par le débourreur et l'entraîneur. Récente avancée de la génomique, le gène de la motivation (= PRCP, ou motivator gene) a été isolé par des chercheurs irlandais de l'University College Dublin, et une société de génomique commercialise désormais un test permettant de déterminer s'il est ou non présent dans le génotype d'un cheval.
Basé sur une étude reposant sur l'analyse de 4.500 sujets, le bien-fondé de cette découverte repose sur le fait qu'un poulain montrant de la volonté à l'entraînement sera beaucoup plus sujet à réussir en courses qu'un autre, moins motivé, et sera de ce fait susceptible de faire carrière dès l'âge de 2 ans ou de 3 ans. L'information, peu ou pas relayée par nos medias nationaux, pourrait ne pas recevoir un vibrant accueil auprès des éleveurs vendeurs et des organismes de vente, considérant l'effet négatif qu'un simple test pourrait occasionner. Rappelons qu'environ 200 gènes exercent une influence sur la performance, et qu'il serait évidemment fort imprudent de condamner un poulain sur la foi de l'absence d'un seul gène !
Pour comprendre ce qu'est la motivation, il suffit par exemple de visionner le Prix Saint-Alary (Gr.1) 2018 remporté par Laurens, qui paraissait battue à mi-ligne droite avant de refaire son retard au prix d'une détermination implacable. D'autres performers célèbres illustrent bien ce trait de caractère, cette volonté de vaincre qu'ils savent volontiers transmettre à leur descendance. Comme Laurens, le sculptural Giant's Causeway n'était pas un cheval disposé à laisser ses adversaires dans le lointain : lutter pour mettre son nez devant ses adversaires sur le poteau lui suffisait amplement, abdiquer étant totalement exclus. Idem pour Hector Protector, entre autres.
Galileo a lui aussi démontré une grande motivation, ses duels avec son aîné Fantastic Light étant restés dans les mémoires. Idem pour Dubawi, à l'image de son propre père Dubai Millennium dont l'allant n'avait d'égal que sa détermination brutale. La piste est là pour mettre en évidence les dispositions mentales des chevaux, et notre travail consiste depuis longtemps à observer, analyser et réportérier les informations les plus judicieuses en la matière.
A l'inverse du cheval motivé, le cheval veule ne demande qu'à mettre les freins dans le parcours et refuse souvent la lutte, même si son potentiel lui confère les moyens nécessaires pour vaincre. Il faut à ces coursiers des entraîneurs et des jockeys sachant utiliser les arguments nécessaires à les inciter à faire leur job. Là aussi, la génétique correspondante se transmet, et rares sont les chevaux veules ayant brillé au haras. Hormis quelques exceptions comme Nashua, le père de mère de Mr Prospector et de Roberto...
Mais la motivation a aussi ses excès, trop d'ardeur et de générosité pouvant mettre à mal la solidité biomécanique du cheval. C'est malheureusement ce qui est arrivé cette semaine au trop généreux Beat the Bank à l'arrivée des Summer Mile St. (Gr.2), qu'il remportait pour la deuxième année consécutive. Que repose en paix ce cheval au grand cœur, trop grand peut-être...
A l’inverse des aplombs vus de face, ceux que l’on relève de profil se transmettent volontiers. C’est notamment le cas de l’appui qualifié de brassicourt, qui se caractérise par des genoux en avant (à l’inverse des genoux creux). Considérée comme étant un défaut si l’on se réferre aux canons de la beauté chez le cheval, cette disposition peu esthétique est pourtant synonyme de solidité, qualité indispensable au cheval de course. Une des grandes lignées mâles historiques de la race pure s’est d’ailleurs fait une spécialité de propager ce type d’appui, à savoir celle de Galopin dont le modèle, fortement ensellé, ne faisait pas de lui une peinture. Né en 1872, ce fils de Vedette fut pourtant un cheval de très grande classe qui remporta dix de ses onze sorties à 2 et 3 ans dont le Derby d'Epsom (Gr.1), sa dernière apparation publique.
Une carrrière dont l'interruption ne fut pas motivée par la fragilité du cheval mais par celle de son propriétaire, passablement cardiaque :
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A l’inverse des aplombs vus de face, ceux que l’on relève de profil se transmettent volontiers. C’est notamment le cas de l’appui qualifié de brassicourt, qui se caractérise par des genoux en avant (à l’inverse des genoux creux). Considérée comme étant un défaut si l’on se réferre aux canons de la beauté chez le cheval, cette disposition peu esthétique est pourtant synonyme de solidité, qualité indispensable au cheval de course. Une des grandes lignées mâles historiques de la race pure s’est d’ailleurs fait une spécialité de propager ce type d’appui, à savoir celle de Galopin dont le modèle, fortement ensellé, ne faisait pas de lui une peinture. Né en 1872, ce fils de Vedette fut pourtant un cheval de très grande classe qui remporta dix de ses onze sorties à 2 et 3 ans dont le Derby d'Epsom (Gr.1), sa dernière apparation publique.
Une carrrière dont l'interruption ne fut pas motivée par la fragilité du cheval mais par celle de son propriétaire, passablement cardiaque : c’est en effet le médecin de ce dernier qui délivra une ordonnance médicale décrétant que Galopin ne devait plus courir, pour éviter les trop fortes émotions qui envahissaient son patient à chacun de ses exploits !
Ainsi orienté prématurément vers le haras, Galopin y effectua des débuts timides avant de se classer tête de liste des pères de gagnants à trois reprises en GB, produisant au total neuf gagnants de Gr.1 dont son chef d’œuvre, le grand Chef de Race St Simon. Ses produits possédaient beaucoup d’influx et de trempe, des tissus denses et de bons tendons, mais ils étaient parfois un peu réduits et légers et non dénués de caractère. Sa descendance n’a pas brillé par sa précocité mais elle fit preuve d’une grande tenue classique.
Fortement brassicourt à l'image de son père, masculin et puissant (1,64 m), solide et doté d’un tempérament très affirmé, St Simon était issu d’une jument âgée de 16 ans qui n’avait rien produit de notable avant lui. Notons que la largeur de sa gorge mesurait 11,7 cm, soit la valeur la plus élevée jamais relevée sur un pur-sang !
Etait-ce là une de ses forces majeures, St Simon était en tous cas doté d’aptitudes exceptionnelles et très polyvalentes, se montrant aussi impressionnant sur 1000 m comme sur 4200 m. Malheureusement pour lui, son éleveur-propriétaire, le Prince Batthyany, disparut lorsque son cheval n’avait que deux ans. En ce temps là (nous sommes en 1883), le décès d’un propriétaire entraînait d’office l’annulation de tous ses engagements classiques, et St Simon dut ainsi se rabattre sur un programme alternatif, pour le compte du Duke of Portland. Qu’importe, il demeura invaincu en dix sorties dont l’Ascot Gold Cup (Gr.1) et la Goodwood Cup (Gr.2), laissant chaque fois son poursuivant immédiat 20 longueurs derrière lui…
Entré au haras à 5 ans en GB, il se classa neuf fois tête de liste des pères de gagnants (un record que seul Sadler’s Wells parvint à effacer un siècle plus tard), et six fois tête de liste des pères de mères. Bai pur et vecteur de solidité et de tenue, St Simon s’est éteint à l’âge vénérable de 27 ans, en 1908, laissant derrière lui 554 foals dont 20 gagnants de Gr.1 et 89 étalons.
Le legs de St Simon est inestimable : aucun de nos pur-sang contemporains n’est exempt de son sang, et son nom figure plusieurs dizaines de fois dans tous les pedigrees (23 fois dans celui de Northern Dancer et 28 fois dans celui de Mr Prospector). La bagatelle de 152 gagnants de Gr.1 sont porteurs d’un inbreeding en 4x4 ou inférieur sur St Simon, ce qui en dit long sur la qualité de sa génétique !
La lignée mâle établie par St Simon se développa via plusieurs rameaux majeurs dont ceux établis par ses fils Chaucer, Desmond, Persimmon, Rabelais et St Frusquin. Parmi ses descendants directs les plus influents figurent Massine, Prince Rose, Bois Roussel, Wild Risk, Sicambre, Princequillo, Charlottesville, Prince John, et surtout l’invincible Ribot dont la lignée est encore vivace de nos jours, via Alleged notamment.
S’il vous arrive un jour d’élever ou d’acquérir un poulain brassicourt, voire passablement ensellé, alors précipitez vous chez votre cardiologue car ce sujet, héritier de Galopin et de St Simon, pourrait bien être la source de trop fortes émotions !