En toute fin du printemps 1919 naquit à Tully, au National Stud irlandais, un foal bai brun qui fut baptisé Blandford. Conçu des œuvres de l’étalon classique Swynford, un vainqueur du St Leger (Gr.1) et des Eclipse St. (Gr.1) dont la carrière avait été écourtée par une fracture d’un boulet ayant nécessité plus d’un an et demi de convalescence avant son entrée au haras, il avait pour génitrice la jument Blanche, maiden en course mais sœur utérine de la gagnante des 1000 Guineas St. (Gr.1) et des Oaks St. (Gr.1) Cherry Lass.
Un très beau pedigree, d’ailleurs triplement inbred sur les Chefs de Race Isonomy et Galopin, pour un poulain élégant et racé mais doté d’aplombs fort critiquables, piqué devant (droit-jointé) avec des appuis antérieurs légèrement brassicourts et des jarrets très droits !
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En toute fin du printemps 1919 naquit à Tully, au National Stud irlandais, un foal bai brun qui fut baptisé Blandford. Conçu des œuvres de l’étalon classique Swynford, un vainqueur du St Leger (Gr.1) et des Eclipse St. (Gr.1) dont la carrière avait été écourtée par une fracture d’un boulet ayant nécessité plus d’un an et demi de convalescence avant son entrée au haras, il avait pour génitrice la jument Blanche, maiden en course mais sœur utérine de la gagnante des 1000 Guineas St. (Gr.1) et des Oaks St. (Gr.1) Cherry Lass.
Un très beau pedigree, d’ailleurs triplement inbred sur les Chefs de Race Isonomy et Galopin, pour un poulain élégant et racé mais doté d’aplombs fort critiquables, piqué devant (droit-jointé) avec des appuis antérieurs légèrement brassicourts et des jarrets très droits !
A l’âge yearling, Blandford connut bien des tourments : violemment agressé par un groupe de chevaux d’attelage ayant forcé la barrière de son paddock, il eut à peine le temps de cicatriser ses blessures pour contracter une pneumonie si sévère qu'il fallut le nourrir à la main pour le sauver. En signe de gratitude, son vétérinaire reçut le poulain en cadeau mais, jugeant son avenir trop incertain, il décida de décliner l’offre…
N’ayant pu être présenté aux July Sales, Blandford passa finalement sur le ring des ventes de Newmarket au mois de décembre, et devint la propriété des frères Dick et Sam Dawson pour seulement 730 Guinées. Insuffisamment estimé par son entourage pour mériter des engagements classiques, Blandford débuta victorieusement en début d’année de 2 ans à Newbury avant d’enchaîner, une semaine plus tard et malgré l’apparition de suros, par une place de deuxième dans les Windsor Castle Stakes. Ce fut sa dernière sortie à cet âge, ses tendons étant devenus si douloureux qu’il dut se tenir éloigné des pistes pendant presqu’un an.
Vainqueur pour sa rentrée devant le futur vainqueur de l’Irish Derby (Gr.1) Spike Island, le 3 ans Blandford confirma sa très grande classe en remportant avec aisance les Prince of Wales's St. (Gr.2). Victime d'un double claquage des antérieurs, ce fut malheureusement sa dernière apparition publique…
Titulaire d’un palmarès se limitant donc à trois victoires et une place en quatre sorties, Blandford entra au haras à 4 ans en Irlande où il ne suscita guère d’intérêt auprès des éleveurs jusqu’à son transfert en Angleterre, dix ans plus tard. Assez peu fertile et disposant d’une jumenterie très modeste à ses débuts, Blandford deviendra pourtant un étalon de tout premier plan, géniteur de nombreux vainqueurs classiques dont quatre lauréats du Derby en l’espace de seulement sept saisons (Trigo en 1929, Blenheim II en 1930, Windsor Lad en 1934 et Bahram en 1935) !
Trois fois tête de liste des pères de gagnants en GB et une fois en France, Blandford a volontiers transmis sa classe pure, sa tenue, son bon tempérament, un chanfrein concave mais aussi une certaine fragilité et … ses jarrets droits. Un attribut que l’on retrouve d’ailleurs chez ses plus glorieux descendants en lignée mâle dont notamment les vainqueurs du Prix de l’Arc de Triomphe (Gr.1) Brantôme et Exbury, ou encore les classiques Alycidon, Crepello et Val de Loir.
Efficacement relayée par Bahram, Blenheim II et Brantôme, sa dynastie est aujourd’hui représentée par la branche érigée par le Chef de Race allemand Monsun mais son sang coule également dans les veines de Mr Prospector, de Nasrullah et de Northern Dancer, et donc chez la quasi-totalité de nos galopeurs contemporains !
Notre amie Criquette Head nous confia un jour que, lorsqu’elle était jeune (disons plutôt adolescente, car jeune elle le sera toujours), elle critiqua l’angle des jarrets d’un cheval qu’elle inspectait aux cotés de son grand-père William Head. Celui-ci lui rétorqua : « ma petite-fille, as-tu vu comme les jarrets des lièvres sont tordus ? Et pourtant, vois-tu à quelle vitesse ils détalent dans la campagne ? Apprends que, lorsque j’inspecte un cheval, je ne regarde jamais ses jarrets !!! ».